Oui bien évidemment, mais ce goût, ce sucre, cette acidité, cette odeur, cette texture, sa taille varient en fonction des saisons, des années et de nombreux autres facteurs.
Un des premiers facteurs est le choix des variétés par le producteur.
Ces variétés, donc ces semences utilisées, sont nombreuses :
– Les semences paysannes, ou reproductibles, dites non hybrides
– Les semences hybrides non reproductibles dites F 1.
Comment le producteur choisit-il ses variétés ?
Le producteur en circuit court privilégiera des variétés avec plus de goût et moins de conservation, afin de se différencier des concurrents et notamment de la grande distribution.
Il optera donc plus souvent pour des variétés avec des semences paysannes ou hybrides destinées au circuit court. Le but sera essentiellement le goût.
Les semences hybrides utilisées en circuit court permettent aux producteurs d’obtenir des plantes et des fruits plus homogènes que lorsqu’ils utilisent des semences reproductibles et, de plus, sur des générations récentes, elles peuvent même être plus résistantes à certaines maladies, à certains ravageurs, et plus adaptées à certaines conditions climatiques plus difficiles.
Ces hybrides de dernière génération permettent d’éviter de faire des traitements, donc de polluer les sols et les nappes phréatiques et de perdre en productivité. En bio et en conventionnel, ce type de semence est utilisé. En effet le goût est altéré et ce sont les qualités de tolérance aux maladies qui sont mises en évidence.
On va utiliser notamment des variétés de tomates résistantes à certains virus comme le TSWV (virus bronzé de la tomate) ou des variétés de melons résistantes à la fusariose ou tolérantes aux pucerons.
Les producteurs peuvent également planter des plants greffés avec des semences hybrides en légumes. Ceci peut être réalisé, par exemple, sur des sols fragiles afin d’éviter certaines maladies et de perdre la récolte. Dans ce cas, le producteur plantera du greffé et aura une tolérance plus forte aux maladies.
Cela permettra aussi d’avoir plus de puissance racinaire comme, notamment, pour le melon greffé au début du printemps alors que les conditions climatiques sont changeantes.
D’autres préféreront du greffé simplement pour la productivité, mais le goût pourra être altéré, notamment avec le cas de l’aubergine greffée. En effet, le porte greffe modifie le goût de départ, car on additionne deux variétés ou deux espèces différentes.
Le choix des semences en plants francs ou greffés est la base du goût, mais le producteur est-il vraiment le seul à choisir ses variétés ?
NON. Les centrales d’achats ont aussi leurs mots à dire dans la décision finale du choix des semences de ses producteurs. La grande distribution préférera acheter à ses producteurs des variétés dites de conservation par rapport aux transports afin d’éviter les déchets lors de la réception de la marchandise et en magasins sur les étals.
Le produit doit tenir un maximum de temps en rayon avec un aspect esthétique parfait.
La grande distribution considère que le client est sensible à l’aspect visuel du produit, elle n’a d’ailleurs pas totalement tort à ce sujet. Elles ont également compris que la clientèle demande des produits avec du goût et du made in France, mais tout le monde ne joue pas le jeu.
Les semenciers aussi ont bien compris cette demande-là ; trouver des variétés avec du goût et résistantes aux maladies avec un look parfait. Cependant au niveau génétique, il est difficile de créer des variétés réunissant toutes ces exigences, donc le goût est forcement moins présent.
Les autres facteurs qui entrent en jeu sont la climatologie et le terroir.
Le climat joue un rôle très important ; en effet les fruits et légumes ont besoin d’un climat optimal de culture. Par exemple, la pastèque a besoin d’un climat chaud et sec pour développer son taux de sucre. Un taux de sucre moindre apporte donc à la pastèque une absence de goût.
La fraise préfère un climat plus tempéré, même si un fort taux de pluie peut entraîner des fraises avec un taux de Brix faible, c’est-à-dire un taux de sucre moindre ; idem pour le melon et de nombreux autres fruits et légumes de printemps.
Si le climat n’est pas adapté, le fruit ou légume a des difficultés lors de son développement, ce qui crée des carences dans son équilibre. Une plante, quelle qu’elle soit, doit être équilibrée pour s’adapter au mieux à toute condition climatique et pour pouvoir se développer correctement.
Le sol rentre en jeu également, dans les cultures, avec le terroir. La composition du sol apporte aux produits un goût, une richesse supplémentaire au niveau nutritif.
C’est pour cela que des labels comme l’ IGP (Indication Géographique Protégée) ont été créés afin de mettre en avant le terroir. La caractéristique du sol apporte une valeur ajoutée aux produits. Par exemple, en viticulture, le cépage ne suffit pas pour faire un bon vin. L’activité du sol, sa composition ont aussi une part importante dans le goût, la texture du vin.
Il en est de même pour le fromage. Ainsi, le Reblochon a un goût différent en fonction du lieu du pâturage.
Cependant, j’entends souvent « On ne retrouve pas le goût des tomates du jardin de mes grands-parents ». Cette année encore, j’ai entendu d’une cliente de chez mon primeur dans le Gard annoncer « Je préfère acheter des fraises espagnoles que françaises par rapport au goût ».
Le consommateur est dans la recherche du goût, c’est primordial pour lui. Cependant, il doit comprendre également que d’autres facteurs importants entrent en jeu dans cette recherche du goût.
Ce que nous devons comprendre, en tant que consom’acteur, c’est de revenir à l’essentiel, en n’exigeant pas de produits hors norme pour notre nourriture. Nous devons nous adapter aux saisons tout en consommant local .
Nous devons aussi respecter le produit. En effet une année il pourra avoir moins de goût que l’année précédente. Nous devons l’accepter et nous ne devons pas prétendre, sous prétexte que nous payons un prix, à nous attendre à l’excellence gustative, à une uniformité parfaite, à une texture idéale.
Le maraîcher en circuit court et en industrie doit s’adapter aux mieux aux aléas qui sont changeants et également aux marchés extérieurs. Son travail de technicien de culture est également déterminant dans cette quête du goût.
Revenons à l’essentiel, dans notre façon de nous comporter et de consommer dans n’importe quel domaine de consommation. L’alimentation doit retrouver sa place de leader dans le comportement des consommateurs et non une place de second choix.